CAUSERIE
de
Pierre CUMINAL

Vice-Président délégué de l'Amicale des Pionniers
et des Combattants Volontaires du Vercors de Romans - Bourg de Péage
sous la présidence de
Pierre De Saint-Prix
Ancien Préfet de la Drôme
Le 24 août 1961
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A la mémoire de mes camarades Victor BOIRON et Albert TRIBOULET et de tous ceux qui sont tombés pour la Libération.

Pierre CUMINAL

PREFACE

Les pages qu'on va lire constituent le récit, parfaitement objectif de la Résistance à ROMANS et BOURG-de-PEAGE du 18 Juin 1940 au 30 Août 1944. On y voit la Résistance à sa source, captée au griffon où se mêlent les eaux pures du patriotisme et de l'instinct de liberté qui, de tout temps, ont étanché la soif des Dauphinois en lutte contre l'oppression. On y sent naître, de la terre même, le refus de la servitude et la révolte dans l'oubli de soi. Nous appellerons cela l'Idéal, en insistant un peu sur ce mot démodé, qui a perdu presque toute signification en un temps de meurtres - et de honteuse prudence.

La relation des nombreux faits notés dans cette causerie, et ordonnés avec méthode par notre ami Pierre CUMINAL, orienteront dans leur travail les historiens futurs. Non pas seulement en leur apportant des documents inédits, introuvables dans les archives, mais en leur apprenant à pénétrer les sentiments et les passions qui animaient les Résistants. Bien des contresens pourraient, de la sorte, être évites.

Cette causerie avons-nous dit, est objective. Mais elle porte aussi la marque personnelle, subjective –irrécusable- que seuls les participants d'un acte historique peuvent imprimer dans le récit qu'ils en font, pour peu qu'ils aient su, dans l'action, se dédoubler, se voir vivre, réfléchir leur propre "geste", - bref, s'ils se sont comportés en témoins lucides. Objectivité et marque personnelle me paraissent être les plus sûrs garants de la véracité de ce témoignage.

Ma modeste expérience administrative -acquise-, il est vrai, à cette époque de la Libération où des pouvoirs exorbitants étaient confiés aux délégués du Gouvernement -m'autorise à affirmer que les documents officiels, sur lesquels les historiens fondent leur travail d'analyse, ne reflètent qu'une part de la vérité, et bien souvent d'une vérité déformée. Le texte d'une motion "négre-blanc", un procès-verbal édulcoré, un ordre militaire, une note de service, un rapport au Ministre ou à l'Etat-Major, - ceux qui les rédigent (s'ils sont soucieux de leur carrière !) savent y introduire assez d'ambiguïtés et d'alibis pour que la suite des événements, quelle qu'elle soit, puisse les disculper ou les justifier... Les décisions graves, on les transmet de vive voix, on ne les écrit pas, si l'on veut survivre aux maîtres de l'heure…

Les meilleurs témoignages, ceux que l'historien doit interroger avec confiance, ce sont les récits brûlants de foi et chargés de souvenirs d'action personnelle, ce sont les cris du coeur (filtrés par la mémoire) de ceux qui, sans arrière-pensée, avec désintéressement, ont vécu un moment d'Histoire.

A coup sûr, Pierre CUMINAL est un de ces acteurs-témoins que l'on doit lire et que l'on peut croire.

Pierre de SAINT-PRIX
Ancien Préfet de la Drôme

LES COLLABORATEURS

Huit mois se sont écoulés depuis la mobilisation générale du 2 Septembre 1939. La Guerre se déclenche plus meurtrière par la puissante et furieuse poussée allemande vers la BELGIQUE et le NORD et 1'EST de la FRANCE. L'ITALIE, conduite par MUSSOLINI, déclare, à son tour, la guerre aux Alliés.

La FRANCE est en partie envahie. DE GAULLE lance un appel le 18 Juin 1940 pour rallier-les patriotes et les engager à continuer la lutte contre l'envahisseur.

Cependant, PETAIN, lui, signe le 25 Juin 1940, un honteux armistice avec HITLER. ROMANS est occupée jusqu'au 7 Juillet. Les Allemands n'ont pas franchi l'Isère.

Déjà hélas, on décompte les Romanais et Péageois restés derrière les barbelés. 500 environ dit-on ? La démobilisation s'effectue pour ceux qui ont pu fuir. La joie de retrouver les siens, en de pareilles heures, laisse ces démobilisés indifférents. Chacun-pense aux conséquences de notre écrasement et à l'incertitude du lendemain. Le moment est donc propice pour imposer un nouveau régime et mettre à terre toutes les lois républicaines.

Les hommes politiques et les militaires qui, depuis longtemps, n'admettaient pas la politique française issue des urnes, se coalisent autour de PETAIN et défendent sa politique. Ils imposent à ce vieillard, leurs prétentions.

Les lois ou les ordonnances de Juillet 1940 apportent des restrictions à la liberté de tous les citoyens. Si vous avez des idées politiques, syndicales ou philosophiques contraires aux maîtres du moment, vous êtes destitué de vos droits. A deux reprises, des Romanais et Péageois sont internés à LORIOL, puis à SAINT-PAUL d'EYJEAUX (Haute-Vienne). Les élus sont déchus, les fonctionnaires déplacés ou révoqués. C'est le cas de trois agents municipaux contre lesquels le Maire prend une décision. Des mesures sont édictées contre les JUIFS, ils sont traqués. Rappelez-vous l'institution de l'étoile jaune. L'ennemi exige l'expulsion de 70.000 Lorrains. PETAIN s'exécute. De nombreux expulsés arrivent dans nos deux Villes. Ils sont accueillis avec sympathie, leur détresse est partagée, et l'on commence à comprendre !

L'avertissement d'HITLER se traduit par une collaboration constante. Pour cela, il faut des organisations susceptibles de remplir ce rôle. Le 31 Juillet 1940, la Légion Française des Anciens Combattants est créée. Nul ne peut adhérer à une autre organisation d'Anciens Combattants, toutes sont dissoutes. Cette Légion reçoit un nombre très emportant d'adhérents. Mais ceux-ci, au fil des jours s'aperçoivent que la défense de leurs droits n'est pas le but primordial. Ils s'en retirent. Cependant, les durs restent et suivent aveuglément PETAIN, Puis la Légion crée le Service d'ordre Légionnaire. Alors là, c'est le début de la délation. Sont dénoncés les Patriotes qui tiennent des propos gaullistes. En Février 1941, Madame FENESTRIER est appelée à la police où le Commissaire lui fait de très dures observations. Ceux qui écoutent la radio anglaise sont également dénoncés à la Police. C'est ce que fait le 3 Septembre 1942, un Monsieur de notre Ville.

Parallèlement, le Parti Populaire Français - le P.P.F. - appuie lui aussi, la politique de PETAIN. Il joue un rôle très important. Il fait de la propagande pour la collaboration avec l'ennemi. Il fait engager des hommes dans la Légion des Volontaires Français contre le Bolchévisme, constituée le 11 Juillet 1941. Après les accords HITLER-LAVAL sur la Relève et la loi du 4 Septembre 1942 astreignant le Service du Travail Obligatoire en FRANCE, il pourchasse ceux qui ne veulent pas travailler pour les Allemands. A ROMANS et BOURG-de-PEAGE, le P.P.F. est particulièrement ardent, il règne en maître et dicte sa loi. Nous connaissons le rôle rempli par ses chefs au moment de la manifestation contre la Relève de Mars 1943.

Le 30 Janvier 1943, la Milice est créée. Son rôle anti-français est vite démontré. Elle se trouve toujours où il faut lutter contre les Patriotes. Elle est la précieuse auxiliaire des Nazis. Elle fait des perquisitions et emmène, quelquefois, les occupants des lieux. Après interrogatoire, elle relâche les innocents tandis qu'elle conserve ceux qu'elle considère comme dangereux.

Ces messieurs suspectent, bien entendu, des Romanais et Péageois dont l'action dissidente leur serait connue. Une vingtaine d'entre nous reçoit, postée de Vichy le 8 Janvier 1944, la lettre suivante :

"Monsieur, Les événements récents obligent le Mouvement National Antiterroriste (M.N.A.T.) à vous faire part de ces dernières décisions qui vous intéressent personnellement. Notre Comité vous a en effet désigné comme otage responsable. Sachez donc, Monsieur, qu'en cas d'attentats sur la personne ou les biens d'un membre de notre Mouvement, vous serez atteint impitoyablement dans votre personne ou dans vos biens. Certes, nous ne vous faisons pas l'honneur de vous accuser personnellement d'actes de terrorisme qui demande une dose de courage qui vous fait, nous le savons, totalement défaut. Mais votre attitude vous désigne à nos représailles.

Dans l'intérêt même de notre cité ouvrière nous avons fait preuve de patience. Vous êtes responsable de la grève provoquée par vos tracts remis dans les boîtes aux lettres et distribués clandestinement. Conséquences : Troupes d'occupation à ROMANS et 24 arrestations maintenues de malheureux ouvriers innocents. Vos agissements criminels ne seront donc plus sans représailles. "

M.N.A.T.

Cette menace ne décourage pas la Résistance et l'activité déployée de plus en plus par la suite en apporte la confirmation.

En Juin 1943, c'est Pierre CLAUDET et Jean NOYER qui sont surpris au moment où ils tracent sur la chaussée des inscriptions antigouvernementales. Ils récoltent 8 jours de prison à Valence.

Le 9 Mars 1944, la Milice a une liste de résistants parmi lesquels figurent : BRUNEL Georges, CAILLET Henri, LACOUR Charles, MELLON Fernand, POCHON Germain, PEREZ DEL BOSQUE (réfugié républicain espagnol) et moi-même. Nous sommes avertis à temps et pouvons échapper aux recherches.

Le 3 Avril 1944, notre Camarade René ROBERT, aujourd'hui Président des Déportés et Internés, est en mission en Avignon. A sa descente du train il est entouré de miliciens et des membres de la Gestapo. Il est enfermé à la prison de cette Ville et condamné à la détention. Il est transféré en Allemagne. A Sarrebruck, pendant un bombardement, il s'évade et rejoint les lignes américaines.

Les 17 et 18-Avril 1944, la Milice arrête deux patriotes : Ernest DIEBOLD, un réfugié Lorrain et Pierre REVOL. Ils sont transférés à Vassieux, puis déportés en Allemagne. DIEBOLD ne reviendra pas,

En Mai 1944, c'est Alex BLANCHARD qui, à son tour, est arrêté par la Milice. Il a sur lui une liste de camarades volontaires pour le Vercors. C'est ainsi que Marius MOUT,

Jean ZAHM, etc.. reçoivent la visite des miliciens, et sont emmenés. Ils seront relâchés par la suite.

Si certains miliciens font preuve d'un courage bestial, d'autres sont plus forts en paroles ou en dénonciations pouvant entraîner des conséquences graves. Ils se

"dégonflent", excusez-moi cette expression. Lorsque DARNAND, le chef national de la Milice, en accord avec ses Maîtres Nazis, mobilise, fin Mai 1944, ses forces, ils ne répondent pas tous à l'appel.

Mon ami Gilbert CHAPELLE et moi, assistons de loin a quelques visites faites par les miliciens, chez leurs camarades récalcitrants ou en .... fuite !

Toute une journée, ils font leur tournée, il semble qu'ils n'obtiennent pas le succès qu'ils espèrent à ROMANS et à BOURG-de-PEAGE. Ils parcourent les rues, arrogants et menaçants, le calme de nos concitoyens ne permet pas de créer des incidents.

Seulement nous les avons identifiés et ainsi que ceux qui les ont abandonnés. Si le régime PETAIN-LAVAL avait triomphé, qu'auraient, fait tous ces "dégonflards" ?

L'ORGANISATION DE LA RESISTANCE

Après le désastre de 1940, quelques Français ne se laissent pas abattre. Ils réagissent et, devant les exigences de l'envahisseur, ils prennent petit à petit conscience de leur devoir. Les mesures de collaboration prises par le Gouvernement de Vichy sont appliquées. Les difficultés de ravitaillement aidant, certaine réticence se manifeste. L'étau se resserre. La constitution du Comité de la France Libre encourage ces hommes. De bouche à oreille, ils font comprendre à d'autres hommes les raisons pour lesquelles il faut résister à l'oppresseur et à ses collaborateurs. Le ralliement des territoires d'Outre-Mer est déterminant. La Résistance s'affirme.

De toutes parts, des hommes, des femmes, au nom illustre ou inconnu, s'enrôlent. En France, des évasions plus ou moins spectaculaires sont annoncées. C'est DE LATTRE DE TASSIGNY qui, après s'être insurgé seul contre les troupes allemandes, rejoint Londres. C'est le Général GIRAUD qui s'évade d'Allemagne où il était prisonnier et s'envole pour Alger, Ce sont des savants, des hommes de lettres, des hommes politiques qui se retrouvent au côté de DE GAULLE. La rigueur de plus en plus grande de la répression galvanise. Des groupes se forment à côté d'autres groupes. Des liaisons existent avec Londres, où siège le Comité des Français Libres, elles s'élargissent. Des contacts s'établissent entre les résistants des villes, des campagnes, la chaîne s'agrandit. De l'assurance est prise devant les événements, l'espoir est né, il faut le faire vivre.

ROMANS et BOURG-de-PEAGE, villes éprises de liberté, s'engagent résolument dans la lutte. Le 14 Juillet 1942, à l'invite de la Résistance, des promeneurs se trouvent sur la Place Jean Jaurès dont le Maire BARLATIER a donné le nom de PETAIN à cette place pendant l'occupation. C'est un des premiers contacts publics. On y trouve des amis. Quels sont les premiers résistants ? des hommes de toutes classes, de toutes religions, de toutes philosophies : Victor BOIRON, Albert TRIBOULET, Alex BLANCHARD, Capitaine VINCENT, Joseph CLAUDET, Docteur GANIMEDE, VIGNON, discutent avec les Gilbert CHAPELLE, Léon DOYON, Marcel REY, Georges BRUNEL, Auguste FOURNIER, André RIOU, Camille GAILLARD, Aimé SUSINI, JOUBERT. Chacun apporte sa contribution et rallie les convaincus et engage les hésitants. Les différents groupements, déjà organisés, se retrouvent au cours de réunions clandestines chez Marcel REY, Zeph RECOUX, Joseph CLAUDET, etc.

En Décembre 1943, le Comité local de la Résistance est créé sous l'égide des Mouvements Unis de la Résistance (MUR). Albert TRIBOULET est chef de district. Alex BLANCHARD est chef de secteur, tandis que le Capitaine VINCENT, lui, est à BOURG-de-PEAGE entouré de fidèles lieutenants. Il s'occupe également des réseaux de renseignements. Dans les communes environnantes, un responsable est désigné. Il a une tâche importante. La distribution des journaux clandestins : COMBAT, LIBERATION, BIR-HAKEIM, l'HUMANITE, LE POPULAIRE, TEMOIGNAGE CHRETIEN, etc.. est assurée par une chaîne de résistants. Des collectes sont organisées pour aider les familles des internés résistants, et des maquisards.

Les renseignements sur l'activité des collaborateurs sont concentrés. Les mouvements, notamment ceux de Mars 1943 et des grèves des 20 Septembre 1943 y sont préparés.

Différents Chefs de la Résistance Nationale ou Régionale sont reçus, notamment CHAVANT dit CLEMENT dans la clandestinité, organisateur et Chef civil du Maquis du Vercors, notre Président actuel des Pionniers du Vercors. Des messagers apportent des consignes, viennent discuter avec nos amis..

Ils emportent d'importants renseignements. La droguerie CHAPELLE devient vite le rendez-vous de tous ceux qui travaillent pour la Résistance. Les informations pour Londres sont transmises par l'intermédiaire de postes clandestins placés chez des amis sûrs. Combien de voyages, Marius MORAND, prudent, a-t-il fait pour transporter des documents ?

Vous pensez bien que la vie clandestine est très difficile. Il faut se méfier. La prudence est de rigueur. La moindre indiscrétion peut entraîner de graves conséquences, le silence est de règle. Le couvre-feu ne facilite pas la tâche, les patrouilles allemandes sillonnent nos rues. Les miliciens sont à l'affût. Les lignes électriques sont coupées afin de priver de courant les usines travaillant pour les Allemands. Les voies ferrées sautent, les convois militaires ou de ravitaillement ne peuvent plus circuler. Les Allemands exigent la garde des voies. Peine inutile, avec la complicité de ces gardes, le travail est encore plus facilité.

De toutes parts, jour après jour, des concours sont acquis à la Résistance. Faut-il négliger l'action clandestine des agents des P.T.T. de nos deux villes ? Certainement pas. Combien de communications téléphoniques ou de lettres de dénonciations interceptées permettent de sauver la vie de nos camarades, combien de renseignements captés sont utilisés pour agir contre l'occupant ou les miliciens. Combien d'actions sont engagées à la suite de diffusions d'ordre codifiées. Faut-il souligner le rôle rempli par nos facteurs qui distribuent, tout en assurant leur service, des journaux de la Résistance, ou transmettent des ordres aux intéressés.

Et les jeunes femmes ou jeunes filles qui parcourent la campagne pour assurer des liaisons importantes et dangereuses. Combien de fois, Janine - Mme MOINEAU aujourd'hui - et tant d'autres, ont-elles porté le courrier dans le Vercors encerclé ? Et toutes ces personnes, connues ou inconnues qui transportent des vivres ou de l'argent aux réfractaires ou aux hommes traqués ?

D'ailleurs, les communications sont facilitées également par les services de l'E.D.F. qui ont, avec les barrages, les priorités pendant les événements du Vercors.

A la S.N.C.F. la présence du Chef de Gare CHAPUS, résistant calme et à toute épreuve, permet de connaître les horaires de circulation des trains allemands, ce qui facilite le travail de nos plastiqueurs, vous comprenez bien pourquoi.

Dans les Gendarmeries de nos deux villes, nous avons des amis qui comprennent de suite où est leur devoir. Sans rien laisser paraître, ils aident fortement la Résistance, je ne citerai pas de nom Je m'en excuse, ils ont manifesté leur sentiment patriotique. Apprenant qu'une perquisition allait avoir lieu, que des recherches allaient être faites, des arrestations opérées, ils avertissent autant que peut se faire, les intéressés. Je peux dire aussi qu'en fin 1943, le nouveau Commissaire de Police s'est mis à l'entière disposition de nos responsables. Tous les procès-verbaux relatifs à la Résistance ou aux Allemands ou leurs collaborateurs, sont tapés, en plusieurs exemplaires, par nos soins. Bien entendu, ces procès-verbaux sont transmis à Londres. Une circulaire confidentielle arrive à la Police ou à la Gendarmerie, elle est aussitôt communiquée au Comité de Résistance. Ainsi tous les moyens sont pris afin d'éviter le pire.

Enfin, la Maison des Jeunes, dirigée par un Lorrain, JANSEN, n'a-t-elle pas été aussi de la partie ? Combien de jeunes sont devenus des réfractaires, puis des maquisards. Je peux également rappeler que la plupart des joueurs de l'U.S.R.P. du moment étaient des réfractaires d'autres villes et jouaient sous de faux noms.

Il y a lieu de souligner également les manifestations de solidarité des Romanais et Péageois qui n'hésitent pas, malgré le grand risque, à héberger, soit des Juifs, soit des patriotes recherchés. Jamais, en aucun moment, il n'y a des réticents. Leur admirable abnégation n'a d'égale que leur conviction patriotique. Combien de fois ces Juifs ou ces patriotes changent de domicile ? Toujours ils sont reçus à bras ouverts, on se prive en famille mais on accueille le proscrit.

Après l'accord de Montoire, la collaboration entre les Nazis et le Gouvernement PETAIN-LAVAL s'affirme. La Relève est organisée en Mai 1942. Ne dit-on pas que par ce moyen des prisonniers seront renvoyés dans leurs foyers et remplacés par ceux de la Relève ? Quel honteux mensonge ! Des jeunes gens sont désignés pour aller travailler en Allemagne. Certains partent, ils n'ont pas compris, ils ont peur peut-être, mais chaque jour, d'autres plus nombreux deviennent plus réticents. Ils passent la visite préalable mais refusent de partir. Ils rejoignent les camps organisés dans le Vercors. C'est un problème de plus à résoudre. Il faut faire manger ces hommes. Octave TARAVELLO et Marius NOYER sont parmi ceux qui, les premiers, n'hésitent pas à mettre leur matériel à la disposition de la Résistance pour transporter ce ravitaillement. Les exploitants forestiers ou les cultivateurs acceptent d'engager les réfractaires et de les cacher. Pour échapper aux recherches, de fausses cartes d'identité sont indispensables auxquelles doivent s'ajouter des cartes de travail prévues par les décrets LAVAL du 4 Septembre 1942, pour tous les Français âgés de 21 à 35 ans astreints au Service du Travail Obligatoire. Des cartes sont raflées dans les Mairies; bien entendu, les cartes d'alimentation doivent être renouvelées, les tickets de pain, de viande, etc.. doivent être délivrés chaque mois. Dans les Mairies, et à Romans en particulier, des complaisances sont trouvées. Des coups de main, préparés avec certains industriels où commerçants, permettent de soustraire des chaussures ou de la toile aux Nazis et, de ce fait, de chausser et de vêtir ceux qui sont camouflés. Sans trahir maintenant un secret, notre ami, le Capitaine VINCENT, s'est fort bien acquitté de cette tâche d'organisation.

Toutes les cartes d'identité remises aux réfractaires et aux Juifs de nos deux villes sont faites ici, la plupart par mes soins. Tout le matériel est dans les combles de la Mairie. Le Préfet COUSIN, contacté par Gilbert CHAPELLE, a remis un cachet de la Préfecture, les imprimés nécessaires pour les confectionner. Il a d'ailleurs été, par la suite, déporté.

La radio de Vichy apporte des informations puisées dans les bureaux de l'occupant ou du Gouvernement de Vichy. Par la voix de Philippe HENRIOT ou de Hérold PAQUIS, elle glorifie les faits de l'armée allemande ou de la Milice. Elle traite de bandit de simples patriotes qui ont tort de croire en la victoire française.

Elle approuve la destruction du Maquis des Glières et du Vercors. Par contre, la chronique locale du "Petit Dauphinois" laisse percer les sentiments de son correspondant, Paul DEVAL. Il ne manque pas une occasion de rejeter sur l'ennemi ou sur le Gouvernement de Vichy la responsabilité du manque de ravitaillement ou des tracasseries dont sont victimes les Romanais et les Péageois. Sa détermination aurait pu lui coûter cher.

La radio suisse est suivie avec intérêt. Jean PAYOT y commente les nouvelles. Son objectivité est fort appréciée par les auditeurs français.

La radio de Londres apporte l'espérance et donne des consignes, elle rétablit la vérité, elle souligne les défaites allemandes. Elle expose les faits de la Résistance, elle annonce le défilé à Oyonnax des maquisards de l'Ain en pleine occupation ou apprend que LECLERC s'illustre à Kouffra, que KOENIG se défend et attaque dans le désert, que le groupe " Normandie-Niémen " participe aux attaques en Russie, que nos aviateurs se joignent à la R.A.F., que nos marins patrouillent en mer et portent haut le Pavillon de la France Libre, et qu'enfin, les troupes américaines débarquent le 8 Novembre 1942 en Algérie. Une foi plus ardente anime nos coeurs. Le dernier quart d'heure va sonner. Mais quel quart d'heure ? Jean MOULIN, Président du Comité National de la Résistance, est arrêté avec un Romanais Bruno LARAT, ils seront massacrés. La zone Sud est envahie le 11 Novembre 1942 par les troupes allemandes.

De toutes parts, la lutte devient de plus en plus ardente. Les représailles sont plus dures. Ainsi, un Romanais André DOUCIN, pharmacien à Saint-Nazaire-en-Royans, est enlevé avec ses trois amis par la Milice. Il est questionné; il ne parle pas. Les brutes le placent sur un fourneau afin de lui arracher les paroles. Devant son silence, et celui de ses camarades, les miliciens les exécutent à Vassieux. A la suite de ce crime odieux, le Comité de Résistance de nos deux villes décide d'honorer ce vaillant combattant de la liberté. Il pense un certain moment faire célébrer un office à l'église N.D, de Lourdes à la mémoire d'André DOUCIN; cette idée n'est pas retenue (le massacre d'Oradour nous a donné raison). Une gerbe de fleurs avec un ruban tricolore est déposée au Monument aux morts de l'Hôtel-de-Ville de ROMANS. L'inscription "A notre camarade André LOUCIN, mort pour la France" est faite au fusain par Madame DEVAL. Une lettre est remise au Maire dans laquelle il lui est interdit de faire enlever cette gerbe... De nombreux Romanais et Péageois sont venus s'incliner. Le lendemain, la Milice prend cette modeste gerbe, la piétine, mais elle n'a jamais su quels étaient les instigateurs de ce geste patriotique.

D'ailleurs, pour les 14 Juillet et 11 Novembre des années d'occupation, une gerbe de fleurs portant l'inscription de la Résistance Romanaise et Péageoise est déposée au Monument aux Morts de la Place du Champ de Mars.

En Mars 1944, quatre jeunes gens ; BILKE Marcel, BROYER Marc, PRIAN Florindo, RIEUTTARD Jean-Marie, volontaires du VILLARD-de-LANS, se trouvent sur la route de BEAUREGARD-BARET. Ils s'en vont à VALENCE remplir une mission. Les Allemands les arrêtent. Porteurs d'armes, ils sont abattus sur le champ. Leurs corps sont transportés au cimetière de ROMANS. Un hommage leur est rendu. Des membres de la Résistance de nos villes plantent des croix de Lorraine sur leurs tombes après les avoir, sur place, peintes aux couleurs nationales.

Je tiens à souligner tout particulièrement, le dévouement avec lequel les chirurgiens, les médecins de l'Hôpital et des cliniques ont soigné nos camarades résistants blessés au cours de ces années terribles. Le personnel n'a jamais refusé son concours et a toujours aidé à camoufler ces blessés. Et pourtant, pour les uns et pour les autres, quel danger ont-ils couru ?

LA RESISTANCE OUVRIERE

La lutte contre l'occupant n'a jamais cessé au sein de la Classe Ouvrière. Malgré la Chartre du Travail, ses militants syndicalistes non inféodés au régime de Vichy, ont continué leur action. Ils ne peuvent se manifester ouvertement, leur activité se déploie dans des organisations syndicales clandestines. Le Syndicat des Travailleurs Municipaux notamment a toujours soutenu les revendications du personnel. Par personne interposée, il a obtenu l'application des textes et surtout, fait connaître ses sentiments.

Les actions de la Milice et des Allemands stimulent l'ardeur des Résistants. L'appel des hommes pour le S.T.O. renforce l'esprit de dissidence. Le Comité de Résistance décide un rassemblement pour le 9 Mars 1943 sur la Place Jean Jaurès, alors appelée par le Maire (Docteur BARLATIER), Place Maréchal PETAIN. Calmement, à la sortie des usines, à 18 heures, des hommes, des femmes, se réunissent. Puis un cortège se forme peur manifester devant les demeures des principaux collaborateurs de nos deux villes. Combien sommes-nous sur cette place ? de 2 à 3.000. La preuve est faite, nos deux villes n'acceptent pas le travail obligatoire en ALLEMAGNE. Elles réagissent.

Dans la nuit des perquisitions de police ont lieu. La Police vient me réveiller à 2 heures du matin. Vérification de fond en comble de mon appartement. Ma fillette de 3 ans doit être levée pour permettre l'opération de police. Puis, c'est le départ pour le Commissariat de Police où je retrouve de nombreux amis et la compréhension bienveillante des agents. Enchaînés, nous sommes dirigés vers la Gendarmerie de VALENCE, puis à la Maison d'Arrêt de l'Avenue de Chabeuil. Là, nous sommes avec d'autres Résistants du département. Le lendemain, 10 Mars 1943, vers 13 h, c'est le départ d'hommes pour le travail obligatoire en Allemagne. Le train est en gare. Voilà des femmes, des enfants qui arrivent pour accompagner leurs parents. La tristesse se lit sur leur visage. On prend leur mari, leur père, leur frère. Que feront-ils pendant leur absence ? Ces hommes ne sont pas décidés à aller travailler pour l'ennemi. Le train va démarrer.

La foule est de plus en plus dense, que va-t-elle faire ? Elle n'hésite pas, elle se place devant le train pour l'empêcher de partir. Des voitures, des camions sont mis en travers de la voie au passage à niveau. Le train ne peut se mettre en marche (photo ci-dessous), le mécanicien, conscient lui aussi, ne fait rien qui puisse gêner l'action de ces patriotes. On discute, les forces de l'ordre - des G. M. R. armés - sont là, maintenant, appelés en hâte, Partira-t-il ou ne partira-t-il pas ? L'heure tourne Le train ne part qu'après 17 heures. Des arrestations sont opérées sur place, des hommes sont emmenés au Commissariat de police, d'autres sont arrêtés à domicile. Tous sont transférés à la prison de Valence où mes camarades et moi, arrêtés la veille, les retrouvons. La place manque dans les geôles, il faut se serrer, je ne vous raconterai pas la vie dans cet établissement spécial. Après vérification d'identité et interrogatoire, la presque totalité de ces hommes sont libérés. Restent : Victor BOIRON, Gilbert CHAPELLE, Jean VILLARD, et moi. Qu'a t-on à nous reprocher ? BOIRON, CHAPELLE et Jean VILLARD sont interrogés. BOIRON et CHAPELLE sont envoyés en liberté surveillée à Die. Après un séjour d'une huitaine de jours à la prison, Jean VILLARD est condamné à 8 jours de prison pour avoir, parait-il sectionné des fils de communication. Quant à moi, je ne subis aucun interrogatoire, mais je reste interné pendant 40 jours.

Voilà une page de la Résistance Romanaise et Péageoise.


Le 10 mars 1943, les Romanais et Péageois empêchent de partir le train emmenant les requis
pour le Service du Travail Obligatoire en Allemagne.

Depuis les manifestations de Mars 1943, contre la Relève, l'effervescence se développe dans les usines. Chacun se dresse contre la fourniture de nos produits à l'armée allemande, le travail est saboté. Chaque jour qui passe, c'est l'énervement qui s'ajoute aux restrictions,, Le 17 Septembre 1943, des tracts sont distribués invitant les ouvriers et les ouvrières à faire grève le 20 Septembre. Le dit jour, la grève est presque totale dans nos deux villes. Les Allemands arrivent, ils ne viendront d'ailleurs s'installer à Romans qu'au cours du mois d'Octobre. Ils arrêtent des ouvriers chez Fénestrier, chez Mossant et chez Sirius. Ils les dirigent sur Valence et Lyon, au Fort Montluc. 26 sont gardés et transférés dans les camps de concentration. Certains sont pris en ville et parmi lesquels des hommes tranquilles. Le 30 Septembre ils reviennent et emmènent un certain nombre désigné par des informateurs de la Milice ou du P.P.F.. Ils sont dirigés vers les camps de concentration. Là, ils vont subir des mauvais traitements, souffrir de la faim, du manque d'hygiène, qui auront raison de 16 d'entre eux. Imaginez le calvaire qu'ils ont supporté ! Comprenez l'angoisse de leurs familles qui n'avaient pas de nouvelles sinon d'alarmantes !

LA RESISTANCE ARMEE

Le Comité de la France Libre envoie des ordres pour le recrutement des volontaires. DE GAULLE proclame le 11 Novembre 1942: "Le 18 Juin 1940, j'ai invité les officiers, les soldats, marins, aviateurs français, les techniciens et les ouvriers spécialisés à se mettre en rapport avec moi pour terminer le combat... Aujourd'hui, 11 Novembre 1942, à la veille de la victoire, au moment où HITLER va occuper tout le territoire, je répète mon appel : Français et Françaises de France, profitez des quelques heures dont vous disposez encore pour venir, si vous le pouvez, vous joindre à ceux qui luttent aux côtés des Alliés. Officiers, Sous-officiers, soldats, marins, aviateurs, avec vos navires, vos avions, vos armes, rejoignez d'urgence les Forces Françaises Libres. Ne laissez pas vos armes entre les mains de l'ennemi. La victoire est certaine. Venez y participer."

Cet appel est entendu dans nos deux villes.

Si, en 1914 ou en 1939, les hommes répondent à un ordre de mobilisation, les soldats sans uniformes des années 1942 à 1944, volontaires, quittent leur foyer, leur famille et leur travail. Quelle abnégation. Ils savent qu'en faisant cela ils se sacrifient et sacrifient les leurs. Demain, c'est la Gestapo, c'est la Milice, qui viendront inquiéter : leur père, leur mère, leur femme, ou leurs enfants. Ils le savent, mais le devoir les appelle. Il faut défendre la Patrie. Ils s'en vont rejoindre les Maquis. Encore aujourd'hui, des hommes ne comprennent pas cela et font une différence entre ceux qui ont été appelés et ceux qui, spontanément, se sont engagés dans les Formations de Résistance. Il n'y a pas deux catégories de Français. Ceux qui sont morts, soit en 1914, soit en 1939-1945, sont morts pour que la France vive !

Dans les Chantiers de Jeunesse instaurés par PETAIN, des hommes acceptent d'entrer dans la lutte contre l'ennemi. Grâce à eux, du matériel, des équipements, de l'habillement, de la nourriture peuvent être détournés et remis aux camps de réfractaires. Les Chantiers de Bourg-de-Péage apportent largement leur contribution. A la suite de la prise de position de ces groupements, le Gouvernement les dissout en Mai 1943.

A l'école de Gendarmerie de la Caserne Bon, le patriotisme fait battre le coeur des officiers et élèves-gendarmes. Des contacts sont pris en Septembre 1943. Une entrevue a lieu entre le Chef Militaire du Vercors et les Officiers de cette Ecole pour mettre au point leurs relations. Le Commandant Germain MARTIN est mort en déportation.

Les appelés S.T.O. ne répondent plus, à quelques exceptions près, à leurs convocations. Les premiers partis, venus en permission, n'hésitent plus, eux aussi, à se planquer et rejoignent les camps de réfractaires du Vercors ou de Chambarand. Après le débarquement d'Algérie et l'occupation de la zone Sud du 11 Novembre 1942, les volontaires toujours plus nombreux s'enrôlent. L'action n'est pas immédiate. En attendant l'appel de mobilisation, les hommes doivent rester tranquilles. Ils doivent se tenir prêts. Des dizaines sont constituées. Les Chefs de ces unités gardent la liaison avec les hommes responsables des affaires militaires de la Résistance. Bien entendu, les uns sont à l'Armée Secrète, les autres aux F. T. P. F., mais tous ont le même idéal. Des exercices ont lieu dans des endroits cachés. Des démonstrations de mitraillettes sont faites par des hommes compétents. Voilà succinctement, comment se sont constituées les Forces Françaises de l'Intérieur, notamment celles du VERCORS.

Des groupes spécialisés sont recrutés. Les hommes sont armés, la plupart du temps munis de fausses cartes de miliciens ou de laissez-passer authentiques délivrés par les Allemands. Des missions de sécurité ou de ravitaillement .leurs sont confiés. La police intérieure doit être assurée afin que des éléments suspects ne profitent pas sous le couvert de la Résistance, pour voler ou piller à leur profit personnel. Hélas, tous n'ont pu être connus et poursuivis. D'autre part, la sécurité nécessite une surveillance permanente de l'Allemand, du milicien ou du collaborateur. Pendant cette période exceptionnelle, tout relâchement peut être néfaste. Il faut veiller et prendre quelquefois de graves décisions.

Le ravitaillement en armes se fait par parachutages. Des avions alliés viennent, dans la nuit, déverser leurs chargements en des lieux désignés à l'avance par le service de renseignements. Un message communiqué soit par radio, soit par une liaison donne jour et heure. Qu'il fasse froid, qu'il pleuve ou qu'il neige, nos hommes se rendent armés sur le lieu prévu avec des camionnettes. Ils balisent le terrain au moyen de feux allumés. Les avions arrivent. Il faut faire vite, car l'alerte peut être donnée. Les armes, les munitions, les vivres sont rapidement enlevés et emmenés en des lieux sûrs. A ce sujet, je dois signaler le risque pris par ceux qui acceptent de conserver ce matériel en une telle époque ! L'atelier de TARRAVELLO est un véritable arsenal ! Un local est même loué près de Bourg-de-Péage, tenez-vous bien, par la Résistance au nom d'un milicien notoire Romanais ! Un stock important d'explosifs y est déposé.

Des parachutages ont lieu dans la région de Chanos-Curson, de Marsaz, de Saint-Martin-en-Vercors, etc.. Les Allemands ne connaissent pas ou trop tard ces parachutages, la mission peut être accomplie.

Pour obtenir des vivres ou des vêtements, les groupes francs sont obligés, avec ou sans l'assentiment des propriétaires, de prendre des dispositions. Ils enlèvent les marchandises dans tel entrepôt ou tel casernement. Ces marchandises ou les armes sont transportées, soit de jour, soit de nuit, malgré le couvre-feu, dans les camps du Vercors ou de Chambarand. Cette besogne est faite par tous les groupes, qu'ils soient de René PIRON, de René BOISSE ou de BOZAMBO. D'autres missions leurs sont données et lorsque vous apprenez qu'une voie ferrée a sauté ou qu'une ligne électrique est coupée, ce sont ces équipes spéciales qui en sont les exécutants !

Parmi les exploits de la Résistance, il y en a cependant qui méritent d'être cités et vous conviendrez qu'ils dénotent de la part de leurs auteurs un certain courage, et aussi un "culot" monstre.

A Portes-les-Valence, une usine fabrique des engins pour la conduite des V 1. Cette installation est de la plus haute importance. Le Commandant AZUR, réfugié à Saint-Donat, alerte Londres. Des dispositions sont prises afin de récupérer l'un de ces engins. Il sera indispensable pour étudier le moyen de contrecarrer l'action des V 1. Un message annonce que l'aviation anglaise mitraillera les murs d'enceinte de l'usine et qu'elle bombardera après la voie de chemin de fer. Pendant ce bombardement, des résistants pénétreront dans l'usine et prendront le dit engin. Vous imaginez le travail, il faut des hommes avertis et à toute épreuve . A qui va-t-on confier cette délicate mission ! Au corps franc de ROMANS, dont la plupart des hommes appartiennent au Corps des Sapeurs Pompiers de Romans. Voilà comment le 10 Mai 1944, la camionnette des dits Pompiers doit emmener des résistants revêtus de l'uniforme des Pompiers. Elle est chargée de mitraillettes et de grenades. Mais la camionnette résiste à sa façon. Elle ne veut pas partir. On la pousse. Hélas, rien à faire. De loin, nos hommes voient une patrouille allemande. Que faut-il faire ? Du secours est nécessaire, pourquoi ne pas le demander aux "frisous" ? Ceux-ci arrivent et tout de suite font lever les bras à nos pompiers, car l'heure du couvre-feu a sonné depuis longtemps. Ils comprennent cependant ce que disent nos patriotes. Il y a le feu, le secours doit être immédiatement assuré. Il faut aider au démarrage de la voiture. Ils poussent ce véhicule surchargé, d'armes et d'explosifs. Enfin, le moteur tourne et les Allemands sont vivement remerciés, ils sont fiers d'avoir aidé ! Ce n'est pas la fin de l'histoire. A Portes-les-Valence, l'alerte a été donnée, les avions anglais tournent dans le ciel. La population se retire dans les abris. Les bombes tombent. Il y a des blessés parmi les civils. Il faut les emmener à l'Hôpital de Valence. Un Allemand prend une initiative. Il accompagne nos pompiers qui ont terminé leur périlleuse mission. Il assure le passage de ce véhicule. Voyez cet Allemand aussi confiant au moment où il craint le plus !

Le Corps des Sapeurs Pompiers participe à d'autres actions de la Résistance. Il a obtenu la Croix de Guerre pour tous ces faits de Résistance.

Je dois dire que les Romanais et Péageois réfractaires sont obligés de s'expatrier. Ils accomplissent leurs devoirs dans les régions qui les reçoivent. Ils participent au même combat libérateur. Ils se battent et certains, parmi eux, trouvent la mort.

Au cours d'une mission dangereuse, le 25 Janvier 1944 à Vienne, deux jeunes : Jean ARSAC et André SAULLORENTE sont arrêtés avec des armes et transférés à la prison Saint-Paul à Lyon. Après avoir comparu devant une Cour Martiale le 10 Février, ils sont condamnés à mort. La sentence est exécutée une heure après le jugement. Pendant cette heure, les malheureux sont autorisés ( ? ) à rédiger une lettre d'adieu à leurs parents. Jugez cela ! Quels derniers moments ?

A Thines, dans l'Ardèche, les jeunes Georges BERNARD et Charles BLANC sont massacrés après avoir résisté aux Allemands.

LE VERCORS

Madame DEVAL m'apporte un concours précieux pour relater les faits qui se déroulent dans nos deux Villes, avant, pendant et après la tragédie du Vercors. En effet, son livre "L'année Terrible" conte avec précision tout ou à peu près ce qui a eu lieu.

Le 5 Juin 1944, l'atmosphère est plus tendue. Il semble que quelque chose va se passer. Les visages sont graves, mais, on comprend que le jour J va bientôt arriver.

En effet, le 6 Juin, la radio de Londres lance son message. Il est significatif pour les initiés. Il annonce le débarquement. Ce débarquement se fait sur les côtes de la Manche. L'enthousiasme fait place aux soucis. L'espoir va se concrétiser. Les Chefs de la Résistance locale se démènent, des va et vient permettent de contacter les uns et les autres. On apprend que la Compagnie PIRON part pour la région de Saint-Donat. Aimé BOURGUIGNON en fait partie. Le. 8 Juin André GENY, toujours volontaire, trouve la mort en accomplissant une mission. C'est dur. Ce jour là, quatre hommes sont envoyés en mission pour trouver des voitures. Ils partent avec une camionnette chargée de grenades. Des Miliciens et des Allemands font un barrage. Ils arrêtent les dissidents, les fouillent et aussitôt les placent contre un talus pour les fusiller avec d'autres, arrêtés peu après. BABOY bouscule un Allemand et s'enfuit, il est mitraillé pendant sa course éperdue. Il se sauve cependant, malgré ses blessures. Les Allemands et les Miliciens font feu sur les autres Maquisards. VALLAYER est emmené par les Boches. Son corps, criblé de balles, est retrouvé dans une clairière. Ses camarades sont morts. VALERO a échappé également et REGEON se terre, ils attendent le départ de leurs assassins. REGEON a mal, il appelle au secours. Les Boches l'emmènent avec VALERO et les interrogent. Leur défense leur semble plausible et ils sont conduits à l'Hôpital de Valence d'où ils s'échappent. VALERO rejoint le Vercors.

Le 8 Juin, une conférence de l'Etat-major se tient à Rencurel. Le 9 Juin à Midi, un ordre arrive au Capitaine CROUAU dit ABEL, suivant lequel la mobilisation du Vercors doit avoir lieu immédiatement. La Compagnie de Romans et de Bourg-de-Péage doit verrouiller la Balme de Rencurel. Le mot d'ordre passe de bouche à oreille et c'est ainsi qu'à 17 heures des volontaires arrivent de tous les quartiers de nos deux villes. Le point de rassemblement est la Place de la gare du Tram à Bourg-de-Péage, sur l'emplacement actuel de la Salle des Fêtes. Ce lieu est proche du carrefour où est élevé le Monument de la Résistance. Sans se méfier des Allemands stationnés à Romans, ils s'embarquent dans des camions à gazogène. Avec quelques armes, ils partent par Rochefort-Sanson, Saint-Nazaire-en-Royans. Combien sont-ils ? 300 à 400. Une surveillance est cependant assuré par le Groupe Franc. Rien ne se passe d'anormal et, tous nous atteignons la Balme de Rencurel. Les fermes nous accueillent et, le soir, dans le village on organise le ravitaillement et les divers services. CROUAU dit ABEL et Albert TRIBOULET et d'autres s'affairent. Tout va bien, les hommes sont conscients de leur devoir et se prêtent volontiers à toutes les décisions. Le Plateau du Vercors devient un centre de résistance. Demain, il se déclarera libre. Mais des tâches immenses attendent les chefs : la défense, la police, la sécurité, sont mises en place. Nous trouvons à certains postes des Romanais : le Capitaine VINCENT et André PICARD.

Le 13 Juin, les Allemands attaquent le Maquis par Saint-Nizier. C'est leur première tentative pour tâter la résistance de ce haut lieu. L'alerte est donnée, les positions sont tenues par des Maquisards. Des combats ont lieu. Des hommes tombent, parmi ceux-là un jeune Romanais BECOMBAZ. L'ennemi ne poursuit pas plus en avant sa marche. Il reviendra plus tard à la charge. Il a des pertes.

Pendant ce temps là, les Boches arrivent à Saint-Donat. Vous connaissez leur comportement dans cette ville : des viols sont commis, des vols opérés et des otages pris.

Le 25 Juin, la Compagnie PIRON fait mouvement vers le Vercors. L'aviation allemande la mitraille.

Le 28 Juin, René JUVIN, l'un des plus ardents résistants, part du Vercors et vient en mission à Romans. Il l'accomplit et va retrouver ses camarades à Bourg-de-Péage. Ils rencontrent un camion chargé de farine, nos amis le réquisitionnent mais un milicien, à bout portant, fait feu sur JUVIN. Blessé, JUVIN est soigné par le Docteur MOREL, puis transporté à l'Hôpital installé à Saint-Martin-en-Vercors.

Le 9 Juillet, la Milice entre en action. Elle a une liste de Maquisards. Elle va chez BOIRON et chez d'autres. ARNAUD, le chef de la Milice, dirige l'opération. Il est furieux, la veille le Maquis a enlevé sa fiancée ( ? ). Il veut se venger. Grâce au service d'alerte, les dégâts sont réduits.

Le 11 Juillet, voilà, à nouveau, la Milice chez LAPIERRE où elle perquisitionne. Il a le temps de fuir, mais son épouse reste. Le lendemain, les miliciens reviennent, pillent et mettent le feu à l'immeuble.

Le 19 Juillet, René JUVIN, toujours lui, remis de sa blessure, est volontaire pour une autre mission. Il arrive à Bourg-de-Péage avec ses camarades. Des Allemands les rencontrent et c'est la bagarre, au cours de laquelle le malheureux JUVIN est abattu.

Le 20 Juillet, une voiture s'avance vers le passage à niveau de Mours. Des maquisards viennent à Romans. Les Boches mitraillent la voiture, PIETTRZINSKI, un Romanais est tué.

Pendant que nous sommes dans le Maquis, la vie est dure dans nos villes. L'angoisse s'empare de nos familles. La Milice, les Allemands, font du mal. Les difficultés de ravitaillement et aussi, il faut le dire, l'argent manque dans les foyers de travailleurs,. L'entraide s'organise. Des Patriotes restés sur place recherchent les moyens pour faire vivre ces gosses et ces femmes. Des collectes sont organisées et il est justice de le dire, riches ou pauvres, industriels ou commerçants répondent à l'appel qui leur est lancé.

Chaque jour, des volontaires nous rejoignent dans le Vercors. Depuis plus d'un mois et demi, nous sommes partis. L'attente est longue, les hommes sont prêts à se battre, mais il faut rester tranquille. La fixation des troupes allemandes est un des buts de notre mobilisation. Eux, les Allemands, ne peuvent supporter ce Maquis. Alors que le terrain d'aviation de Vassieux est aménagé et va être prêt pour l'atterrissage des avions américains, ce sont les planeurs allemands qui s'y posent le 21 Juillet. Quelle stupeur ! Des homes en débarquent, les armes crachent le feu. C'est l'attaque surprise, les habitants de Vassieux fuient, ils sont mitraillés. Les Maquisards tentent de résister, mais leurs moyens sont insuffisants. C'est la terreur en ce lieu. La Chapelle-en-Vercors est bombardée. A Valchevrière, la pression ennemie est plus forte. De toute part, c'est la mort. Devant cette situation tragique, l'ordre de dispersion est donné. Mon groupe part pour les bois des Coulmes, avec des camarades. Nous y restons pendant 14 jours avec des rations de vivres très limitées. D'autres s'en vont vers la forêt de Lente, ou dans les secteurs environnants. De partout nos hommes se " planquent ". Certains essayent de s'en aller, de rallier la plaine. Là, de nombreux camarades sont pris et fusillés. Il y en a qui veulent traverser l'Isère à la nage. Ils sont tués par les Allemands. Le 27 Juillet, c'est la tragique tuerie de la Grotte de la Luire. L'ennemi conduit par les miliciens, se surpasse en barbarie.

A Romans, les Allemands s'acharnent sur les familles de nos camarades. Ils font sauter la boulangerie de Madame REY à Saint-Nicolas. Pensez, son mari est prisonnier et son fils est dans le Vercors. C'est le pillage ou le feu chez le Docteur GANIMEDE, CLAUDET fils ou DESCOMBES. A Bourg-de-Péage, ils arrêtent SARTRE et CHALOIN, et Madame CLERC. Ils brûlent la ferme CHALOIN. L'appartement VINCENT est, une fois de plus, visité. Des nouvelles pessimistes viennent du Vercors. On annonce des disparus, des morts. Combien sont-ils restés là haut ou dans les plaines ? Chaque jour, des noms s'ajoutent à des noms. 120 Romanais et Péageois ont leur nom sur le Monument aux Morts de nos deux villes. Avec quel acharnement ils ont été tués. Notre bon camarade TRIBOULET est parmi ces victimes. Lui, si généreux, n'a pas voulu venir avec mes camarades et moi, son devoir l'appelle ailleurs dit-il ? Il est arrêté, il ne parle pas, mais n'a-t-il pas été dénoncé par la Milice ? Il est fusillé avec d'autres à Saint-Nazaire-en-Royans, le 1er Août 1944. Pourtant lui, Albert TRIBOULET est un patriote comme tant d'autres. Il n'a, il m'en parlait souvent, que l'ambition, la paix retrouvée, d'éduquer les jeunes ! Le Lycée Classique porte aujourd'hui son nom.

En parlant, de ces douloureux événements, soulignons le travail accompli par la Croix Rouge pour retrouver les malheureux corps et les ensevelir. Qu'ici elle reçoive les remerciements des Pionniers du Vercors.

LA LIBERATION DES DEUX VILLES

Le sacrifice du Vercors ne doit pas être vain, la libération de notre Pays nécessite encore des sacrifices. Le Commandement se regroupe, des hommes se retrouvent, des liaisons s'établissent. Le Capitaine THIVOLLET est à la tête d'une unité. Il est chargé de la libération de nos deux villes. Le 15 Août, les troupes alliées débarquent sur les côtes de la Méditerranée. Le 22 Août, l'ordre est donné d'attaquer nos deux villes et de déloger les Allemands. Vers 8 heures, je suis chargé de prévenir le Commissaire de Police, le Lieutenant de Gendarmerie et de faire évacuer les services de la Mairie. A 9 h 30, les troupes avancent et encerclent Romans. Des hommes se joignent aux Maquisards. La lutte devient plus dure. Les Allemands résistent et se retranchent au Collège Classique, à la Caserne Bon et au garage Citroen. Les Sénégalais, qui se sont échappés du Vercors, sont là, ils participent à l'action. Les balles sifflent, des F.F.I. tombent. A 13 heures, les Boches essayent de se dégager du Collège. Ils sortent et de toutes parts, ils sont attaqués. Puis plus rien, des cadavres Allemands jonchent la Place Jean Jaurès. De très nombreux prisonniers sont faits et sont dirigés sur Triors. Le Commandant PHIPHI est nommé Commandant de la place. Les Miliciens ne sont plus là, ils ont fuit, les traitres ! Nous nous sommes libérés seuls. C'est la gloire de la Résistance Romanaise et Péageoise. Je ne citerai pas tous les faits qui se déroulent ce jour-là, Madame DEVAL les rappelle fort bien dans son livre.

Dans l'après-midi, RAOUX, dit MORGAN, reçoit une colonne Américaine.

Le lendemain, le Général COCHET remet à RAOUX sa nomination d'administrateur de la Ville. A partir de ce moment, le Comité de Résistance se transforme en Comité de libération et prend en main la direction des affaires communales. RAOUX, dit MORGAN, fait afficher l'appel suivant :

"L'heure de la Libération est venue. Aidées et soutenues par l'avance foudroyante des troupes alliées, nos forces ont libéré notre Ville de l'envahisseur. La Liberté reprend ses droits dans le Dauphiné d'où elle était partie à la conquête du monde. Sachez vous en montrer dignes. Conservez le calme et le sang froid qui vous ont valu l'admiration du monde pendant les années douloureuses que vous venez de vivre. Nos épreuves ne sont pas terminées. La guerre est encore à nos portes. Nous mettrons tout en oeuvre pour adoucir vos souffrances et vos privations, mais nous exigeons de vous la stricte discipline que nous imposent encore les événements. Chacun doit rester à son poste ou à sa place. Nous ne tolérons aucune vengeance personnelle. Nous punirons de mort tout acte de pillage. Les traitres seront châtiés, les coupables, quels qu'ils soient seront punis, mais dans la plus stricte légalité. L'arbitraire a fini son temps. La vraie France renaît ! Vive la France ! Vive la République !"

le changement de régime entraîne certaines perturbations. Tout est à reprendre. Après l'euphorie de la libération, chacun doit se remettre au travail. Pour l'Administration de la Ville, les Résistants siègent en permanence. Des décisions sont à prendre. On enterre les morts du Vercors ou de la Libération. Un Milicien qui a tiré sur les F.F.I. est fusillé sur la Place Jacquemart.

Le 23 Août, alerte, les Allemands traqués dans la vallée du Rhône, cherchent des passages. Passeront-ils à Romans ? Non, pas ce jour-là. Mais le dimanche 27 Août à 13 heures, alors que les Romanais et Péageois prennent leur repas, des colonnes allemandes avancent par la route de Tain, On croit d'abord que ce sont les Américains. Il faut déchanter. Les armes claquent, les chars mitraillent. La peur s'empare de la population. Les F.F.I. se mettent en position mais devant la supériorité de l'armement de l'adversaire, ils se replient. Romans et Bourg-de-Péage sont, à nouveau, entre les mains allemandes. Des morts, parmi lesquels des civils. Sur la route de Saint-Nazaire-en-Royans, Victor BOIRON, le brave, et son ami PAQUEBOT, sont tués. Des otages sont pris, ils sont enfermés dans des cafés de nos villes. Les Allemands règnent en maîtres. Le couvre-feu est décrété.

Les immeubles qui ont abrité des dissidents sont la proie des flammes. A Bourg-de-Péage, le feu ravage plusieurs immeubles. Trois jours de terreur, les Allemands accompagnés de traîtres entrent à l'Hôpital. Ils recherchent des Résistants et des soldats américains. Ils ne trouvent rien sinon des blessés allemands. Ils sont satisfaits, les leurs sont soignés humainement. Les Boches sont maintenant pressés par l'avance américaine. Le 30 Août, ils abandonnent nos deux villes. Au deuil du Vercors vient s'ajouter celui de ces tristes journées. C'est le désastre et la désolation. Nous revenons à la Mairie où tout est dispersé. RAOUX, dit MORGAN reprend en main l'administration de la Ville. C'est la fin du cauchemar, mais il reste beaucoup à faire pour soulager la misère et le chagrin. Les "collaborateurs" sont arrêtés et internés parmi lesquels 75 sont condamnés par la suite par la Cour de Justice à des peines variant des travaux forcés à l'indignité nationale.

CONCLUSION

Mes camarades Pionniers du Vercors et moi avons voulu, à l'occasion de l'Anniversaire de la Libération, rappeler simplement et brièvement à ceux qui y ont participé, à ceux qui l'ont mal connue, à ceux qui l'ignorent, notamment aux jeunes, ce qu'a été la Résistance dans nos deux Villes du 18 Juin 1940 au 30 Août 1944.

Grâce aux éléments fournis par des résistants ou puisés dans des livres relatant les événements de cette époque, nous avons pu faire ce récit succinct, sec. Il est, sans aucun doute, décousu. Il n'est pas facile de placer les faits dans leur contexture propre. Il est également incomplet. D'autres pourront le compléter.

Si nous avons évoqué l'action néfaste de l'ennemi et de ses collaborateurs, nous n'avons pas voulu passionner ce débat en citant les noms de ces derniers. Qu'il nous soit cependant permis de leur demander de se faire oublier, qu'ils ne se manifestent pas, qu'ils restent tranquilles. Leur présence notamment aux cérémonies de la Résistance ou de la Libération est déplacée.

La guerre, dit-on, n'a pas de limites. Cependant, il y en a de difficiles à franchir sans se déshonorer. Nous, Pionniers du Vercors, l'avons dit, nous le répétons. Comme à Oradour-sur-Glane, nous n'oublions pas les atrocités commises notamment dans ce proche Vercors, par des criminels de guerre.

Le souvenir de la encore récente fin tragique des 120 Romanais et Péageois ne s'efface pas. Si d'autres l'oublient ou l'ont oublié, leur conscience les a déjà jugé ou les jugera avant que les hommes les jugent.

Mon cher ami, Pierre de SAINT-PRIX, toi qui fus Préfet de la Libération, tu as bien voulu présider cette réunion. Je t'en remercie bien vivement. Pionnier du Vercors, tu as déployé, dans le département de la Drôme, une activité remarquable pendant ces années terribles. Ton patriotisme et ton civisme sont bien connus et appréciés de tous. Toi qui t'es jeté, sans arrière pensée, dans la lutte pour la libération de notre Pays, tu penses avec moi : aucun parti politique, aucune organisation syndicale, religieuse ou philosophique ne peut dire que la Résistance lui appartient. La Résistance, c'est l'ouvrier, l'industriel, le commerçant, le paysan, le fonctionnaire, l'étudiant, l'artiste, le docteur, etc.. C'est la réaction spontanée de ces hommes et de ces femmes épris de liberté. L'union de tous ces patriotes a permis de chasser l'ennemi, d'empêcher les traites d'accomplir leur misérable besogne.

Certains peuvent dire ou écrire, comme Joseph POUZIN, du mal sur la Résistance. Peu importe le jugement de ces hommes qui ont encore la nostalgie du régime de Vichy. L'Histoire jugera le rôle néfaste joué par ces valets d'HITLER et dira bien haut la part importante prise par la Résistance Française pour l'écrasement du Nazisme.

Le 21 Août 1961

Association des Anciens du 11ème Cuirassiers Vercors Vosges Alsace
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