Première attaque de Valence :

Les Américains se sont fortement renforcés. Arrivés de Grenoble en passant par Romans, des unités de la 45ème D.I.U.S. ont rejoint Les forces du Colonel STEEL de la 36ème D.I.U.S. et la Task Force du Général BUTLER. Devant cette conjoncture favorable, "LEGRAND" estime que le moment est venu d'attaquer la ville de Valence, tous moyens confondus, avec l'ensemble des Maquisards disponibles, placés sous son commandement.

Sur le principe, le Colonel STEEL est d'accord. Il obtient le "feu vert" de ses supérieurs, car il s'agit, ni plus, ni moins, de piéger le Général Allemand WIESE et les unités qu'il n'a pas pu encore faire remonter vers le Nord. L'objectif est tentant.

En réalité, c'est un gros morceau. Il y a encore plus de trente mille Boches dans le secteur de Valence dont des troupes extrêmement aguerries, comme la 11ème Panzer qui, remontant vers le Nord, est venue renforcer les unités qui gardent le couloir ouvert. Il semble bien qu'avec des troupes Françaises, cette attaque aurait été menée différemment, la motivation n'étant pas la même.

L'attaque est prévue à 22 heures en suivant le plan de bataille ci-dessous :

1°- Sur l'axe central Chabeuil à Valence, en suivant la D68, le gros des forces du Colonel Américain VINCENT, constitué par deux Escadrons de T.D., d'un bataillon d'infanterie portée U.S. renforcés par les Maquisards des Cies "PERRIN" et "KIRSH",

2°- Sur l'axe Nord Alixan à Saint-Marcel-lès-Valence et Montelier, les Cies "CHRETIEN", "SABATIER", "SANGLIER" et "MORIN", appuyées par des Tanks Destroyers,

3°- Sur l'axe Sud Beaumont à Valence, les Cies "BEN" (BRENTRUP - 6ème -), la 2ème de CHAPOUTAT, la 4ème Cie de PEQUINIOT, ramenée en renfort de Grenoble. Celle de "PIERRE" (Lt CHALLAN-BELVAL), la 10ème Cie de "POPAUL" (Capitaine PONS), la 1ère de "ROGER" (Lt MAISONNY) et la 5ème Cie du Lt WAP, appuyées par trois Tanks Destroyers.

"ANTOINE" (Commandant BENEZECH) doit accompagner cette colonne, tandis que le P.C. Central est installé dans une baraque de l'aérodrome de la Trésorerie de Chabeuil.

" St SAUVEUR" (Commandant CONSTANT) et "LEGRAND" sont aux côtés du Colonel Américain VINCENT lorsque, comme convenu, il donne l'ordre d'attaquer à 22 heures. Deux groupes d'artillerie Américains, placés prés de Chabeuil, appuient l'attaque de leur tir.

Par la D538, soutenue par des T.D., la Cie "ROGER", partant de Montéléger, prend la direction de Valence. A la hauteur du carrefour des Trois-Bûches, la colonne Alliée bute sur un bouchon défensif Allemand très sérieux constitué, entre autres de plusieurs anti-char et de 88. Le Commandant "ANTOINE" est légèrement blessé et un T.D. est démoli dès les premières minutes de l'engagement. Coup sur coup, deux autres T.D. sont atteints. Le Colonel VINCENT, jugeant qu'il a trop de casse, décide de se retirer. Malgré les-interventions répétées de "St SAUVEUR", les Américains stoppent l'offensive.

"St SAUVEUR" a de bonnes raisons pour souhaiter que la ville de Valence soit rapidement libérée; il sait que la vie de plusieurs Patriotes Français détenus par les Boches est en jeu, et que tout peut arriver d'un moment à l'autre si l'on intervient pas rapidement.

Dans la prise de Valence, les autres colonnes se sont heurtées à des résistances plus ou moins grandes. Elles se sont montrées peu efficaces devant la riposte des batteries Allemandes et le peu de mordant des troupes Américaines. Tenu au courant par radio, le Général PATCH lui-même ordonne le repli.

Le nombre de victimes de ces combats s'établit à un Américain et deux Allemands.

Au Sud, en Provence, les Allemands combattent avec hargne contre les troupes Alliées qui essayent de leur barrer les routes de l'intérieur. De part et d'autre des combattants valeureux tombent au cours de ces multiples accrochages.

Par contre, il n'en est pas de même dans la vallée du Rhône sur la RN7. Là, c'est la Wehrmacht qui paie le plus lourd tribut pour protéger le repli de sa XIXème Armée. En ce jour, entre le mitraillage de l'aviation Alliée, les embuscades des Patriotes et les obus de l'Artillerie Américaine, elle dénombre plus de quarante morts dans ses rangs.

De notre côté, nous avons à déplorer la mort de plusieurs compagnons de lutte ainsi que celle de trois Américains.

A l'hôpital de Romans, SAMBO, le courageux Sénégalais, blessé lors de la prise de Romans, rend son dernier soupir.

Deux obus Allemands font trois victimes : Deux à Romans et une à Bourg-de-Péage. A Livron, c'est un obus Américain qui tue deux civils Français.

A Gières, non loin de Grenoble, les Fritz contre-attaquent et tuent huit Américains. Le Lt JOHNSON est furieux. Aussitôt il téléphone à "HERVIEUX" pour lui dire :

"Vous voyez, j'ai eu tort de vous écouter, je me suis beaucoup trop avancé !"

Ce que voyant, "HERVIEUX" envoie à la rescousse la Cie "SAPIN" qui, dans un élan irrésistible, reprend Gières. Malgré cette réussite, il reste toujours une batterie ennemie qui, durant les combats, prend Grenoble pour cible à partir de Domène. Par une manœuvre de débordement par Uriage, les Maquisards réussissent à la localiser et à transmettre ses coordonnées. Elle est prise à partie par l'artillerie du Lt Colonel JOHNSON qui la fait taire.

Au cours de ce nouvel engagement, deux autres Américains, Huit Français et des Felgrau se font tuer.

En fin de journée, à certains signes, les Alliés sont convaincus que les Allemands sont sur le point de déclarer forfait. Mais, avant de se rendre, ils font sauter leurs munitions. Puis, peu après toute une série d'explosions, une jeep apparaît devant les lignes des Alliés. Elle est conduite par deux officiers Américains faits prisonniers la veille, lors des combats de Gières. Elle précède une voiture arborant un drapeau blanc. Dans la voiture, entre une sœur de Saint-Vincent-de-Paul et le maire ceint de son écharpe tricolore, un officier subalterne Allemand vient demander les conditions éventuelles de reddition.

Environ un millier de "vert-de-gris", abandonnés à leur triste sort par ¬leurs officiers, qui se seraient pour la plupart enfuis en Suisse dont la frontière est proche, sont démoralisés. Ils savent qu'ils sont pris au piège et ne demandent qu'une chose, pouvoir se rendre aux Américains qu'ils attendent avec impatience. L'officier Allemand est mis en présence du Lt Colonel JOHNSON et de "HERVIEUX". Il reconnaît que ses hommes sont épuisés, que les force de ses adversaires sont trop importantes, mais il n'est pas question pour lui de se rendre aux Français, qu' il méprise.

Le Lt Colonel JOHNSON lui fait comprendre que: "S'il veut se rendre, il n'a pas le choix, ils doivent se rendre aux Français car ils ne peuvent faire autrement, ils doivent savoir que c'est la fin des combats pour eux."

Par sections entières, toute la nuit, les Allemands vaincus rendent leurs armes. Etant donné les exactions qu'ils ont commises durant l'occupation, ils sont très inquiets sur leur sort. Néanmoins, voyant comment se passe le déroulement de la reddition, rassurés, le soulagement se peint sur leurs visages d'en avoir enfin fini avec cette guerre qui leur parait sans issue pour eux; heureux d'avoir réussi à sauver leur peau.

Le butin en armes récupérés par les Maquisards est considérable. Outre les armes individuelles, les Fritz abandonnent aux vainqueurs de nombreux véhicules de toute sorte, une batterie de 150 en parfait état de marche, mais, malheureusement, presque sans munitions; des anti-char, des 88, de nombreux panzerfausts et beaucoup d'autres matériels en tout genre.

Malgré tout, toutes les troupes ennemies ne veulent pas se rendre. Celles qui ont conservé un semblant d'unité, commandées par des officiers plus ou moins fanatiques, se replient en bon ordre sous la protection de chars et de blindés légers. Venant de Grenoble, ces troupes cherchent à atteindre Lyon.

Naturellement des accrochages ont lieu, des combats les opposent aux Maquisards de la Grande-Chartreuse et de Savoie; à Pont-de-Beauvoisin, aux Abrets, à La-Tour-du-Pin. Aux cours de ces engagements des hommes des deux parties disparaissent dans la tourmente. C'est ainsi que les Boches perdent une douzaine des leurs et les nôtres ont trois morts.

Sur les talons des Fridolins, les bataillons de "DURIEU", de "LOISY" et de "MARIOTTE" du groupement "CHABERT", s'installent à Heyrieux, Crémieux et Bourgoin. A Bourgoin où "CHABERT" a installé son P.C., le Lt Colonel JOHNSON vient, avec ses troupes, renforcer les F.F.I.

Grâce à la Résistance Civile, "CHABERT" est informé de l'importance des troupes Allemandes dans la ville de Lyon. Pour éviter à la population civile des pertes trop sérieuses, "BAYARD" donne l'ordre d'éviter tous combats de grande envergure qui pourraient être préjudiciables à la population de Lyon.

Dans le centre de Toulon, les F.F.I. ont fait leur jonction avec les F.F.L. Ces derniers reçoivent continuellement des renforts en hommes, matériels et munitions; de ce fait, les combats redoublent d'intensité. Les Allemands retranchés dans leurs blockhaus, subissent des bombardements de plus en plus intenses, malgré la riposte de leur artillerie planquée dans les arsenaux et les forts. Beaucoup de soldats meurent dans les deux camps.

Maison par maison, ruine par ruine, l'étau se resserre autour de la garnison Allemande. Chocs, F.F.I. et autres combattants grignotent petit à petit le périmètre défensif des Allemands. Un à un les forts de la côte Est et Ouest de Toulon tombent les uns après les autres.

A Marseille, la progression se fait également maison par maison. Telles des fourmis, les F.F.I. et les troupes régulières s'infiltrent partout. La gare Saint-Charles est encerclée. Attaquée, elle est prête à tomber. A la poste, la situation est à peu prés identique. Des immeubles de la rue Vacon, tirant des étages supérieurs, des Snipers (tireurs utilisant des fusils à lunette), bien cachés dans le renfoncement des fenêtres à l'ombre des pièces, tirent par intermittence, réapparaissant là où on ne les attend plus. Ce sont de vrais spécialistes du tir. Les immeubles paraissant pourtant inoccupés. Un Sherman leur envoie plusieurs obus; l'infanterie fouille les étages en vain. Le feu des Snipers reprend de plus belle, mais ailleurs. Il faut dire que depuis le temps que les Boches occupent le quartier, ils le connaissent à fond.

Tout à coup, le fort Saint-Nicolas se déchaîne. Il prend en enfilade la Canebière, la rue Vacon et les rues adjacentes.

Le fort du Merlan a été pris par une cinquantaine d'hommes du Maquis de Saint-Jean-du-Puy. En effet sous le double commandement de Louis DELEUIL et de Roger HUCHEDE, ils sont partis de Trets pour participer à la conquête de Marseille.

Quant aux Maquisards du Puits-d'Auzon, ils poursuivent leurs patrouilles de ratissage de la région et ramassent des prisonniers qu'ils s'empressent de remettre à la gendarmerie.

Sur les rives du Rhône, à Arles, Tarascon et Avignon, les troupes Françaises se heurtent à une résistance farouche et désespérée des troupes du Général WIESE. Celui-ci se sent de plus en plus coincé entre d'une part, les F.F.I. et Américains au Nord de la vallée du Rhône, qui s'appliquent à retarder au maximum la retraite de sa XIXème Armée et; d'autre part, la 1ère Armée Française de DE LATTRE qui ne tardera pas à être renforcée par les unités débarrassées du souci de la prise de Toulon et de Marseille. Il a appris par son E.M. que la reddition de ces deux villes ne tarderait plus guère. Il est grand temps de passer à l'offensive pour désenclaver ses troupes. Il faut absolument qu'elles puissent échapper à l'étau qui ne cesse de se resserrer.

A ce jour, la 36ème D.I.U.S., épaulée par les F.F.I., n'a pas réussi à interdire complètement la retraite Allemande vers le Nord. L'encerclement n'est pas étanche. Cependant, le temps viendra bientôt où les Alliés se renforceront au Nord de Montélimar. La consolidation de ce renforcement ne peut que s'accentuer; d'autant plus que le Général WIESE sait que la situation à Paris, loin de s'améliorer s'est brusquement et considérablement dégradée puisque les troupes Alliés foncent vers le Luxembourg et la Belgique, amorçant déjà un mouvement tournant vers le Sud. Il ne lui reste que peu de temps pour effectuer le repli.

Il transmet ses directives à ses officiers supérieurs. Briser l'encerclement sera la mission de la 11ème Panzer Division et de la 198ème D.I. (Division d'Infanterie) commandées par le Général WEND VON WIETERSHEIM. Celui-ci est chargé d'ouvrir la route du repli vers le Nord.

Renforcés par des éléments d'autres Divisions, ce groupe de combat est chargé, dans un premier temps, de briser l'encerclement qui, à Montélimar et ses environs, s'est partiellement établi autour de la XIXème Armée; de desserrer l'étreinte en attaquant sur tous les axes "intérieurs", en direction de Crest, de Grane et de Saou, pour décongestionner la RN7.

Des ordres très stricts sont donnés aux responsables des différentes unités pour qu'ils soient à la pointe du combat avec leurs hommes. L'attaque est prévue pour le 25 Août à 9 heures. Tous les moyens doivent être mis en œuvre. L'artillerie devra briser toute résistance adverse. La Flak devra utiliser ses pièces de 20mm en appui terrestre. Les actions des bataillons de Grenadiers, de chasseurs blindés, régiment blindé d'artillerie et voitures blindées seront coordonnées pour avoir un maximum d'efficacité dans le combat qui va s'engager. Ces ordres doivent être tenus rigoureusement secrets pour bénéficier de l'effet de surprise et aider ainsi à la réussite de l'opération.

Il a même été prévu que l'artillerie sur rail soit de la partie. Elle a reçu les ordres formels de réduire au silence l'artillerie Américaine à l'aide de ses batteries blindées de canons lourds.

En un mot, rien ne doit être ménagé, ni hommes, ni matériels, ni munitions. II faut que cela passe ou que ça casse. Les groupes Hax, Thieme et Wilde sont tenus pour responsables du bon déroulement des opérations préliminaires.

Vendredi 25 Août 1944

Pour le Général Français Monsabert, il n'y a aucun doute, il faut prendre au plus vite Notre-Dame-de-la-Garde, qui sert d'observatoire aux Allemands.

Il fait encore nuit lorsque les tirailleurs de la 1ère Compagnie du 7ème RTA se préparent à exécuter les ordres reçus. Ils ont passé la nuit dans les immeubles du cours Puget. Guidés par deux F.F.I. connaissant bien le quartier, ils partent du cours Puget et passent par les rues de l'Abbé Dassy et Vauvenargues. Grâce aux échelles que leur prêtent les habitants, ils franchissent les murs et traversent jardins et ruelles pour s'infiltrer silencieusement jusqu'au jardin de l'Archevêché. Devant eux se dresse, grandiose et, dans le contexte actuel, dangereuse, Notre-Dame-de-la-Garde perchée sur sa colline.

Tout autour de la Basilique, le rocher où a été construit l'édifice sacré, est truffé de blockhaus et de casemates en béton. En haut du clocher des Boches montent la garde. Ils sont remarquablement bien placés pour surveiller les environs.

La section de l'Aspirant Audibert installe ses trois F.M.. Sur ordre, elle ouvre le feu sur les fentes de tir des blockhaus. La réaction est immédiate. Un feu d'enfer balaie le jardin de l'Evêché. Dominé par les Boches, Audibert est obligé de le quitter et de se réfugier dans la résidence d'été de l'Evêque en y transportant ses blessés.

De leur côté, les canons de 88 tournés vers la mer, ouvrent le feu et martèlent la résidence d'été de l'Evêque jusqu'à le transformer en passoire et en brasier. Monseigneur Delay et le Chanoine Gros soignent les blessés avec un courage remarquable. Les tirailleurs font un feu d'enfer, appuyés en cela par les autres sections de la Compagnie. Mais le combat s'éternise car les défenseurs sont déterminés à repousser les attaquants.

En fin de matinée, arrivent deux chars du 2ème Cuirassiers. Aussitôt, ils participent au combat. Au début de l'après-midi, le "Jeanne-d'Arc", dont l'équipage tire panneaux fermés pour éviter les éclats d'obus adverses, est touché par deux 88 et prend feu. Le chef de char, le Maréchal des logis Keck André et deux de ses hommes sont brûlés vifs. Seuls deux hommes d'équipage réussiront à sortir.

Pendant ce temps, "Le Jourdan", commandé par le Maréchal des logis chef Louis Lolliot, fonce vers la montée qui mène à l'oratoire. Une explosion et le voilà arrêté, il a sauté sur une mine. Déchenillé, il est immobilisé. C'est l'une des situations les plus dangereuses pour l'équipage d'un char. Là où ils se trouvent, les hommes du "Jourdan" n'ont pas intérêt de sortir du véhicule. Ils tirent donc à "tout va" sur les ouvertures des blockhaus ennemis.

Brusquement, vers 15 heures, d'immenses flammes sortent des casemates, lèchent le sol, brûlent tout sur leur passage, allant jusqu'à faire fondre le goudron de la montée en direction de l'oratoire.

Les tirailleurs sont perplexes. Ils se demandent pourquoi les lance-flammes ont été mis en action alors qu'ils n'ont pas encore attaqué. Les troupes d'Afrique font plusieurs tentatives de sortie des abris pour lancer l'attaque sur la Basilique. Mais ces essais échouent devant la vigoureuse riposte des Fridolins.

Audibert est obligé de faire évacuer monseigneur l'Evêque et monsieur le chanoine, en même temps que ses blessés. Pendant cette action, un troisième char du 2ème peloton du 2ème Escadron du 2ème Cuirassiers, "Le FABERT ???" vient se ranger au côté du "Jeanne-d'Arc" qui brûle toujours. Le Maréchal des Logis Marcel Saintot, chef de char, dirige le tir sur le P.C. ennemi installé au Fort Saint-Jean; sur d'autres blockhaus et prête main forte" au "Jourdan" pour aveugler les meurtrières des casemates de Notre-Dame à l'aide de ses mitrailleuses.

Vers 16 heures, il semble bien qu'une légère accalmie se dessine. Profitant de ce relâchement, le Lt Pichavant donne l'ordre d'attaquer "au culot". Malgré la riposte Allemande, les tirailleurs progressent sous la protection d'un feu intense dirigé tout spécialement sur les meurtrières des blockhaus. Les tirailleurs parviennent à franchir le mur d'enceinte, pénètrent ainsi dans la cour intérieure de la Basilique, mitraillant sans arrêt les ouvertures des abris. Vingt-trois Allemands commandés par un Feldwebel, se rendent, bientôt suivis par neuf autres dont un officier d'artillerie. Ils sont faits prisonniers sur la grande terrasse supérieure côté Ouest.

Monseigneur Borel et plusieurs sœurs sont libérés. Ils ont toujours refusé de quitter Notre-Dame.

Un grand drapeau tricolore est hissé sur le haut de la Basilique. Maintenant qu'il flotte majestueusement, une immense clameur monte de la capitale phocéenne qui a compris que "La bonne Mère est délivrée".

Maintenant que la Basilique est aux mains des Français, les batteries Allemandes du Frioul l'ont prise comme objectif et la canardent, obligeant les Français à trouver refuge dans les casemates Boches. Les murs de la Basilique sont sérieusement endommagés par plusieurs trous d'obus.

Vers 17 heures, malgré le bombardement intense, l'Adjudant Herbelin entraîne sa section vers la Basilique. Il la rejoint sans trop de casse. Ce ne sera pas le cas du Lt Pichavant qui, après plusieurs tentatives infructueuses et des pertes, ne pourra y arriver, avec les autres sections de la Compagnie qu'après une bonne demie heure.

Dans les fortins qui entourent la base de la Basilique, il reste de nombreux Fritz qui continuent le combat. Afin d'arrêter cette lutte inutile, Audibert tente de persuader un sous-officier Allemand prisonnier d'aller parlementer avec ses frères d'armes pour qu'ils cessent le combat. Il risque de ne pas revenir, mais cela n'a plus guère d'importance. Tôt ou tard, les Allemands seront obligés de se rendre ou de mourir. A eux de choisir ! Le sous-officier Allemand accepte et va, avec deux de ses hommes, essayer de convaincre les combattants Allemands des derniers blockhaus encore actifs. Une heure après, il revient avec un commandant, huit officiers et une quarantaine d'hommes.

Un officier Français d'artillerie prend immédiatement possession des lieux. Il s'installe avec ses hommes et son poste radio. Il va pouvoir diriger le tir de notre artillerie sur les derniers points de résistance des fortifications de la grande ville. Il faudra encore trois jours complets de combats acharnés pour que Marseille soit entièrement libérée.

En questionnant les prisonniers faits à la Basilique, l'Aspirant Audibert finit par connaître la raison du déclenchement prématuré des lance-flammes. Ces appareils sont assez perfectionnés. Ils peuvent être utilisés soit au coup par coup, soit simultanément. La mise à feu partielle ou totale s'effectue par déclenchement électrique. Le sous-officier spécialiste de la mise en marche des lance-flammes n'a pas pu ordonner, la mise à feu. En observation à un créneau, un éclat d'obus du char "Jourdan" le frappe de plein fouet. Le crâne fendu, l'Oberfeldwebel s'écroule sur son assistant, un tout jeune soldat. Se voyant couvert du sang de son chef, il panique, croit à une attaque de grande envergure et s'empresse d'actionner le dispositif de mise à feu général, persuadé qu'il agit pour le mieux. Tout par d'un seul coup. "Inch Allah !" les tirailleurs musulmans peuvent remercier la "Bonne Mère" de les avoir préservés d'un aussi grave danger.

Bien plus tard, en 1981, quand le 11ème Régiment de Cuirassiers, dissous en 1963 à Orange, puis recréé à Carpiagne sous l'appellation de 11ème Régiment de Cuirassiers -C.I.A.B.C.- (Centre d'Instruction de l'Armée Blindée et de la Cavalerie), le Quartier sera appelé :

Quartier Maréchal-des-Logis Keck

En mémoire du courageux sous-officier du 2ème Cuirassiers, mort dans l'attaque de Notre-Dame-de-la-Garde.

Du côté de Toulon, les combats continuent à faire rage. La fusillade se rapproche du port. Dans l'Arsenal, les Fritz commencent à faire sauter systématiquement toutes les installations pour les rendre inutilisables.

Ne laissant que quelques unités terminer la prise de Toulon et Marseille, une grosse partie des troupes Françaises engagées, fait déjà mouvement vers le Nord en direction d'Avignon.

Dans le secteur de Montélimar, l'attaque Allemande se déclenche à l'heure prévue, suivant les ordres du Général Wiese. L'action est d'une violence inouïe. Dés le départ, les unités blindées Allemandes se heurtent à celles des Américains qui sont renforcées par une infanterie faite presque uniquement de F.F.I. Afin de les contourner, ils essayent de s'infiltrer par des routes secondaires. Ils empruntent les routes allant en direction de Montboucher, de la Batie-Rolland et, en même temps, ils avancent vers Bonlieu-sur-Roubion et vers Marsanne tandis que la 198ème D.I. attaque de Saint-Marcel-les-Sauzet en direction de Condillac.

Au même moment, au Nord d'Avignon et de tous les points où ils se trouvent stationnés, d'énormes convois se mettent en route. C'est ainsi que certains remontent vers Valréas par la D976, d'autres vers Nyons par la D94; d'aucuns, par la D71 essayent d'atteindre Grignan afin d'arriver à La-Bégude-de-Mazenc par le Sud. De Montélimar, de nombreux véhicules de toute sorte se dirigent vers Livron par la RN7.

Cette énorme migration n'est pas passée inaperçue. Aussitôt, l'aviation Alliée entre en action. Elle mitraille et bombarde la RN7. C'est un véritable déluge qui s'abat sur la XIXème Armée Allemande. Un grand nombre de véhicules sont détruits. Pour fuir, les Boches utilisent tous les moyens à leur portée : Vélos volés (disons réquisitionnés), chevaux pour remplacer ceux qui sont tués, car l'Armée Allemande utilise toujours des chariots hippomobiles à quatre roues.

En effet, malgré l'essence synthétique fabriquée par l'industrie Allemande, l'Armée a toujours énormément de difficultés d'approvisionnement en essence. Le moindre litre compte et les soldats Allemands n'ont jamais fait de gaspillage; mais il est non moins vrai que l'Armée Allemande a une consommation énorme de carburant pour faire rouler tous ses véhicules blindés.

C'est la panique, le sauve-qui-peut !

Sur toutes les petites routes qu'ils empruntent, les soldats de la Wehrmacht sont confrontés sans arrêt aux unités F.F.I., renforcées maintenant par des éléments réguliers U.S.. Leur allure est désespérément lente et en plus, ils sont contraints d'effectuer de nombreux détours à cause des ponts sautés qu'il n'est plus question de remettre en état. Néanmoins, ils progressent en jalonnant leur retraite de leurs morts. Ils sont dans l'incapacité d'évacuer leurs blessés grave (Pour la plupart, ils décèdent faute de soins appropriés. Hélas, ce repli est parsemé aussi de toutes les victimes civiles tuées soit aux cours des engagements, soit abattues par pure vengeance. Cette Armée n'est plus qu'une gigantesque bête aux abois qui se bat avec l'énergie du désespoir.

Durant cette seule journée, plus de cent cinquante Allemands rendent leur dernier soupir et plus d'un millier sont blessés. On déplore la perte d'une quinzaine de G.I. et au moins autant de Français ont donné leur vie pour la France.

La Flak réussit à abattre un chasseur piloté par un officier Français. Blessé, il est capturé. Au mépris de la convention de Genève, il est froidement abattu par les Nazis.

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Suite...

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